Dès la sortie de sa caverne, l’humain a commencé à construire des murs. D’abord pour se protéger de tout ce qui voulait y entrer et plus tard pour empêcher tous ceux qui voulaient en sortir.
La palissade fut sûrement le premier mur qui fut érigé. L’« homo deboutus », hors de sa caverne était un gibier de choix pour la faune affamée de la préhistoire. Le mur devenait ainsi un symbole de sécurité, un élément nécessaire à la survie.
De palissade à château
Les petits campements devenant des villages, les murailles englobèrent de plus en plus d’habitants. Du bois à la pierre, les murs devinrent des forteresses de plus en plus imprenables. Puis du fort, l’enclos devint château. Au centre, dans un certain luxe, habitait la royauté; autour, dans la basse-cour, vivait la plèbe avec les chèvres les poules et les cochons.
La plupart des châteaux devinrent des villes, y vivre assurait la sécurité. À la longue, les personnes coupables de crime qu’on avait expulsées commencèrent à créer hors des murs des petits hameaux qu’ils protégeaient difficilement. Ce fut le temps où l’on inventa le plus de types d’armes. D’abord pour se protéger des animaux puis pour se défendre contre les autres humains.
Plus tard, qui l’aurait cru, on se servit des murs pour empêcher les gens de partir. On venait d’inventer la prison, la détention et le contrôle sur les mouvements d’une population.
Le plus grand mur
En Chine, la « Grande Muraille » est l’un des plus vieux et des plus longs murs construits. D’une longueur totale de 6 259,6 km, ces fortifications militaires construites, détruites et reconstruites en plusieurs fois entre le IIIe siècle av. J.-C. et le XVIIe siècle pour marquer et défendre la frontière nord de « l'empire du Milieu ». C'est la structure architecturale la plus importante jamais construite par l’être humain à la fois en longueur, en surface et en masse.1
Le rideau de fer
Érigé en 1961, le « Mur de Berlin » est une frontière intérieure allemande qui a séparé physiquement la ville en Berlin-Est et Berlin-Ouest pendant plus de vingt-huit ans et a constitué le symbole le plus marquant d'une Europe divisée par le rideau de fer. Il a été surnommé « mur de la honte » par les Allemands de l’Ouest et « mur de protection antifasciste » pour le gouvernement est-allemand.
Plus qu'un simple mur, il s'agissait d'un dispositif militaire complexe comportant deux murs de 3,6 mètres de haut avec un chemin de ronde entourant intégralement le secteur ouest de la ville sur 155 km, équipé de 302 miradors, de dispositifs d'alarme et de barbelés dressés vers le ciel, et surveillé par 14 000 gardes et 600 chiens.2
Le mur coréen
Le mur construit entre la Corée du Sud et la Corée du Nord a été construit en 1945. Au lendemain de la défaite du Japon à la fin de la Seconde Guerre mondiale, Américains et Soviétiques s’entendirent sur une occupation militaire conjointe de la Corée. Le 38e parallèle nord constituant la limite théorique entre les deux zones.
La frontière entre les deux pays qui mesure 238 kilomètres est elle-même située au milieu d'une zone démilitarisée (DMZ), bande tampon de quatre kilomètres de largeur. L'ensemble du système fait de la séparation entre les deux États la frontière la plus militarisée du monde.3
Israël, des murs partout
En Israël les murs, barrières et clôtures sont partout. Non seulement elles sont là pour délimiter les territoires palestiniens, mais il en existe également avec ses voisins syriens, libanais (conflits) et égyptiens (immigration).
Au nord on trouve le mur de séparation non loin de Jérusalem-Est. Il sépare la municipalité de Jérusalem de la Cisjordanie. Il est composé à environ 95 % d'un système de clôture ainsi que d'un mur de 8 mètres principalement. La longueur prévue de cette barrière est de 708 km et est en cours d'édification par Israël, depuis 2002.4
L’autre mur important est la barrière entre la bande de Gaza et Israël. Il s’agit d’une barrière de séparation de 65 kilomètres, constituée d'acier et de béton le long de la frontière entre la bande de Gaza, Israël et l’Égypte. Elle est défendue par des moyens technologiques avancés.
La construction de cette barrière a été décidée par Israël après la guerre de l'été 2014. Le 7 décembre 2021, Israël annonce avoir achevé sa construction après plus de trois ans de travaux.5 C’est au nord de ce mur qu’eut lieu l’attaque du Hamas vers Israël le 7 octobre 2023.
Le mur états-unien
C’est en 2006 que le gouvernement des États-Unis vota la construction d’un mur qui les séparerait de l’immigration illégale provenant du Mexique et de l’Amérique du Sud. Longue de 1 300 km, cette barrière aurait coûté jusqu’à aujourd’hui de 20 à 40 milliards. Depuis, même si les autorités affirment qu’il aurait limité de 25 % l'immigration illégale, ces résultats sont largement contestés.
Depuis l'automne 2006, des travaux d'extension du mur sont en cours. 455 km de barrière furent élevés en 2007. À terme, la nouvelle clôture devrait atteindre plus de 1 120 km de long entre la Californie et le Texas, soit un peu plus d'un tiers de la longueur totale de la frontière qui compte 3 141 km.6
Les murs invisibles
Au-delà des briques et du béton existe une autre sorte de muraille : les murs diplomatiques. Ces murs invisibles qui entourent les États ne se traversent qu’avec un passeport. Sans qu’il y ait de barrières physiques il est difficile, voire impossible, d’entrer ou de sortir de certains pays.
Par exemple, obtenir un passeport pour sortir du pays n’est pas une mince affaire pour des endroits comme, évidemment, la Corée du Nord mais aussi pour la Russie, la Chine, le Japon, l’Inde et plusieurs pays arabes.
L’entrée est également problématique pour les pays cités plus haut et pour certaines grandes puissances. Obtenir un visa pour le Soudan, l’Albanie, l’Australie, les États-Unis et pour certains pays d’Asie, est possible en théorie mais pas pour tout le monde; sous certains régimes on prend en compte la couleur, l’origine, la religion, le sexe et parfois même l’orientation politique et sexuelle du demandeur.
Levez le pont-levis !
Mais le pire est que ces murs, qu’ils soient en béton ou politiques, enclavent les sociétés en excluant ceux qui sont considérés comme des « indésirables ». Les catastrophes environnementales, les guerres et les conflits mondiaux ont créé de gigantesques déplacements de population qui ont tôt fait de dépasser les capacités d’accueil des pays-providences.
De sorte que les ponts-levis se lèvent, que de plus en plus de portes se ferment. Les milliers d’exilées fuyant guerres et tyrannie n’ayant plus de cap, ils meurent en mer empilés dans des embarcations de fortune flottant sur les eaux internationales, seul endroit sans murs ni barrières.
Les 120 millions de sans-murs
Depuis les cinquante dernières années, on a assisté à une importante augmentation du nombre de personnes qui fuient ou ont été forcées de fuir leur pays. Et ça continue alors que les débouchés pour eux diminuent de jour en jour. À moyen terme, on peut craindre une impasse. Où iront les déplacés quand les issues deviendront de plus en plus rares ?
[…] chaque minute, au moins 20 personnes doivent tout quitter pour échapper à un conflit, à la persécution ou à la terreur.7
Selon les nouveaux chiffres publiés par l'agence des Nations unies pour les réfugiés (l'UNHCR) 7, au 15 juin 2024 le nombre de personnes qui fuient ou ont été forcées de fuir leur pays est passé à plus de 120 millions cette année. Il s'agit d'une augmentation de 8 % par rapport à l'année précédente et d'un record absolu depuis que l'organisation a commencé à tenir des registres, selon le HCR. Les enfants représentent environ 40 % de l'ensemble des personnes déplacées de force.8
Épilogue
Finalement, les murs représentent bien la façon dont la société se divise de plus en plus en deux côtés opposés. Pour certains être à l’intérieur des murs est une sécurité, le même intérieur est une prison pour d’autres. Le « village global » n’existe plus la société moderne se dirige vers un retour des seigneuries, des cloisonnements culturels, des « terres de la couronne », des cités interdites. Finirons-nous par devenir des empires hermétiques faisant semblant de ne pas voir ceux qui à l’extérieur des murs vivent dans la misère, sans papier, sans patrie.
Malheureusement, c’est vrai, qu’il y a toujours un côté du mur à l’ombre.
Merci aussi à ceux qui n’ont pas lu.
RÉFÉRENCES
1
Wikipédia - Grande Muraille
2
Wikipédia - Mur de Berlin
3
Wikipédia - Mur de la Corée
4
Wikipédia - Barrière de séparation israélienne
5
Wikipédia - Barrière entre la bande de Gaza et Israël
6
Wikipédia - Mur du Mexique
7
8
Information supplémentaire
Sciencepost - Carte : les murs et barrières entre les hommes
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