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Le pet mis à nu



Qu’on le nomme gaz ou flatulence, le pet impose sa présence sur terre partout et depuis toujours. Que ce soit par le son ou l’odeur qui le caractérise, ce vent intestinal est connu par tous et chacun. Pet silencieux, gaz pseudo mortel, flatulence sonore, tous ces airs portent les malheurs, des mal-aimés, des mal-senties, des rejetés. Bien que parfois satisfaisant, le pet fait honte et la plupart des gens préfèrent en cacher la paternité. Mal nécessaire, voici le pet dans tous ses éclats.

 

Avant tout, clarifions les choses. Le verbe péter peut exprimer deux actions : flatulence ou éclater avec bruit. Par exemple, il a pété sa bulle et il a pété et ça pue. Donc, péter a généré son lot d’expressions qui ballottent entre ces deux significations : envoyer péter quelqu'un, péter dans la soie, péter de santé, péter plus haut que son cul, ça va péter, péter la gueule à quelqu'un, péter de travers, péter le feu, péter les plombs, se péter la gueule. Mais ici, c’est le péter puant et sonore que nous allons explorer.


Anatomie du pet

L’origine du pet se situe assurément peu après l’invention de l’anus. Car c’est bien l’anus, l’artisan principal du pet. Comme une anche de saxophone, c’est lui qui régule, les notes et les intonations du souffle intestinal.


Pour bien aborder le pet, il faut comprendre que l’anus, ce musicien, dépend totalement de tous les organes avant lui qui digèrent les aliments. C’est, en effet, entre la bouche et le rectum que la recette d’un pet s’élabore.


La panoplie des odeurs

Il est normal de péter, mais les odeurs de faibles à pestilentielles font de cette expression de l’anus une action gênante. Difficile de révéler aux dix autres personnes dans l’ascenseur que c’est nous qui avons lâché cette bombe à l’odeur d’œufs pourris.


Vu que le pet est le résultat de la stagnation dans le colon suite à l'ingestion de certains aliments, le pet contient du sulfure d'hydrogène, célèbre pour son odeur d'œuf pourri. Le scatole et l'indole sont deux produits chimiques également présents dans le pet et qui sentent particulièrement mauvais.

Slip anti-odeurs réf. 8

Heureusement, la compagnie japonaise Serein9 vient d’inventer un sous-vêtement révolutionnaire qui neutralise les mauvaises odeurs avec des particules de céramique, qui absorbent les composés olfactifs.


Recettes de pet

Mélomane, mais aussi nauséabond, chaque pet a ses caractéristiques propres. Ses recettes sont concoctées avec brio par la section digestion. À chaque mets, son pet.


« Les flatulences sont produites par la flore intestinale qui dégrade les aliments, notamment par un phénomène de fermentation qui aboutit à la formation de gaz dans l'intestin […] Les flatulences surviennent en général après les repas, car elles se forment environ 3 heures après l'ingestion d'aliments. Elles sont émises sans douleur. »

Dr Frédéric Cordet, hépato-gastro-entérologue à Bordeaux.1


Aliments qui font péter

Nous avons tous constaté que nous pétons plus quand nous mangeons certains aliments en particulier. Pensons aux fèves et aux pois chiches qui sont de grands générateurs de gaz intestinaux.


« La constipation et l'alimentation riche en produits fermentescibles (comme les sucres, graisses, certains fruits et légumes) vont aggraver ce phénomène et être responsables de ballonnements, douleurs abdominales, et émissions de gaz intempestifs et le plus souvent malodorants", explique le Dr Cordet. Les flageolets sont particulièrement réputés pour provoquer des flatulences, mais d'autres aliments peuvent en donner, comme le soja, les lentilles, les choux ou les pois. Les produits laitiers libèrent eux aussi beaucoup de gaz lors de la digestion. D'autre part, les féculents comme les pommes de terre et les pâtes favorisent également les flatulences, car ils sont décomposés dans l'intestin. »1

 

La bataille des pets (1864). Waseda University, Japon 6

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Les ingrédients du pet riche

Certaines vilaines personnes désirent se venger de quelqu’un en l’empestant d’horribles pets. Voici une liste d’ingrédients que ces petits malins consomment afin de concocter des gaz aux odeurs fétides, infectes, méphitiques, miasmatiques, nauséabondes, pestilentielles ou putrides.


Les grands générateurs de pets puants sont les sucres, les graisses, le soja, les lentilles, les pois, les fèves au lard, en fait toutes les fèves. Les produits laitiers libèrent eux aussi beaucoup de gaz lors de la digestion. D'autre part, les féculents comme les légumes racines et les pâtes, la banane, le chou et ses variantes ou encore les oignons et poireaux. Les pommes de terre produisent aussi des flatulences, tout comme la viande rouge.


Remarque : pour le péteur vengeur qui veut s’attaquer à un groupe, il est conseillé de se faire un repas avec la plupart de ces aliments et de les engouffrer en aspirant le plus d’air possible. Effets fulgurants garantis.


À l’opposé, les anti-pets sont le gingembre, la menthe ou encore la cannelle.


La musicalité du pet

Une des caractéristiques célèbres du pet est la variété spectaculaire de sons, de notes, de mélodies qu’il peut interpréter. Si, comme on le fait avec les oiseaux, on tentait de répertorier tous les « chants » du pet, on n’en verrait sûrement jamais la fin. En effet, chaque anus a son accent, son articulation propre. Un peu comme les différentes voix humaines et leurs tonalités.


Toutefois, grâce à Internet, quelques pétophiles ont produit des sites où sont répertoriés par des fichiers sonores des centaines de gaz. Afin de les classifier, on leur a tous donné un nom descriptif. Ça pète de précision et ça a l’avantage de ne rien sentir.


Archives sonores de pets

 

Métier : Renifleur de pets

Non, ce n’est pas une blague, en Chine les maîtres renifleurs de flatulences peuvent estimer l’état de santé d’une personne en fonction de ses pets, moyen de diagnostic médical que de nombreux Chinois prennent très au sérieux.


Pour devenir un grand maître en la matière, le renifleur de flatulence doit tout de même remplir certaines conditions: avoir entre 18 et 45 ans (âges où l’odorat est réputé être le plus sensible), être non-fumeur, ni buveur d’alcool, ni utilisateur(trice) de maquillage, ni porteur de chaussures en cuir (dont la cire altère les senteurs) et ne pas être atteint de coryza.


Un bon odorat est souhaitable, ce qui se travaille en suivant des formations spécifiques.

Les maîtres les plus célèbres peuvent gagner jusqu’à 300 mille yuans (environ 55 000$ CAD ou 36 270 € ) par an. 7


Le pet animal

Si l’humain exhale environ 1 kg de CO2 par jour, multiplié par 6,8 milliards d’humains, on atteint le 6,8 million de tonnes métriques.2 Tout le monde pète, y compris les animaux. Mais les espèces qu'on élève industriellement produisent plus qu’une odeur désagréable, elles libèrent des quantités considérables de gaz à effet de serre qui, de plus en plus vite, accélèrent le réchauffement climatique.


Voici une liste des plus grands pollueurs animaux :


La vache

À cause de la fermentation dans son rumen, la vache peut libérer jusqu'à 550 g de méthane par jour. Cela dit, c’est l’élevage qui est le plus problématique. Responsable de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre, soit un peu plus que les transports.


Récemment, une accumulation de méthane, produite par les flatulences de 90 vaches, a provoqué une explosion dans une étable, soulevant le toit, mais sans blesser sérieusement, heureusement, les bovins. Par contre, la bonne nouvelle, c’est que certains régimes peuvent réduire ces émanations, qui, soit dit en passant, sont libérées sous forme de pets, mais surtout, de rots.


Le chameau

En Australie, les flatulences et rots des chameaux sauvages inquiètent. Un chameau émet environ 1,1 tonne métrique de dioxyde de carbone par an. Avec une population de 2 millions en 2020, ils pourraient émettre jusqu’à 1,9 million de tonnes de dioxyde de carbone.


L’éléphant

Si ce ne sont pas des ruminants comme les vaches et les chameaux, il n’en demeure pas moins que les éléphants polluent énormément (ou du moins, pas mal). Selon l'International Elephant Foundation,3 une voiture "pourrait parcourir plus de 30 km avec la quantité de méthane produite par un éléphant en une seule journée."


Le cheval

Le cheval peut produire jusqu'à 20 kg de méthane par an, soit une quantité suffisante pour influer sur le changement climatique.


Le kangourou

Ceux qui croyaient que les pets de kangourous allaient sauver la planète peuvent se rhabiller. Contrairement à ce que l’on croyait pendant longtemps, le kangourou ne laisse pas sa place quand il s’agit de méthane libéré dans ses flatulences. Il en rejetterait une quantité moindre que les vaches, mais équivalente à celle des chevaux.


Les termites

Ne vous laissez pas berner par sa taille, car le termite serait la 2e plus grande source naturelle de méthane sur Terre! En fait, le problème n’est pas la quantité émise par un seul termite, mais plutôt le fait que les termites sont très nombreux...


Le mouton

Tout comme les autres ruminants, les moutons ont un système digestif complexe. Digérant partiellement la nourriture, qui fermente avant d'être régurgitée puis digérée à nouveau, le processus n'est pas sans libérer une quantité moyenne 18 livres de méthane par an.


Le cochon

Le cochon est digne de mention, quoiqu’il produit bien moins de méthane que les autres espèces dans cette liste avec sa moyenne de 3 livres de méthane par année.


La chèvre

La chèvre, elle aussi un ruminant, participe comme bien d’autres aux émissions de GES (gaz à effet de serre). Selon la FAO (Food and Agriculture Organization des Nations Unis), les ruminants domestiques sont responsables, rots et pets, de 37 % du méthane lié aux activités humaines.


Les dinosaures

Les flatulences des grands herbivores produisaient 520 millions de tonnes de méthane par an dans l'atmosphère, soit 5 fois plus que nos ruminants. D'après les chercheurs, ils auraient ainsi grandement participé au réchauffement climatique, à leur époque.2


Mais il y a des solutions !

Eh oui, un chercheur s’est penché… sur la question. Jason Goldman s’est spécialisé dans la culture de l'Asparagopsis taxiformis, une algue dont la composition chimique interrompt la production de méthane chez les bovins.

« Inclure un demi-pourcent d'Asparagopsis taxiformis à l'alimentation des bovins permettrait de réduire la production de méthane de 80% », avance Goldman.

« Appliquer cela mondialement serait équivalent à retirer des routes toutes les automobiles », précise-t-il. Mais fournir l'algue aux 1,5 milliard de bovins de la planète nécessiterait de produire annuellement 200 millions de tonnes de cette plante. 4


Une autre solution étudiée provient des scientifiques du projet international RuminOmics5. Ayant confirmé que les gaz des pets de bovins dépendaient de leur microbiome, donc de leurs gènes, ils suggèrent d’élever des bovins dont l’ADN modifié les ferait produire moins ou même pas de méthane.


Mais l’idée d’ajouter des algues à l’assiette des vaches de la planète afin qu’elles pètent plus « vert » me semble plus naturelle et plus intéressante, pour la vache et la santé de la planète.


Épilogue

Finalement, le pet ne fait pas de discrimination. Que ce soit les rois, les présidents, les papes, tout le monde pète. Apparemment qu’on s’habituerait même à nos propres pets. Mais, une chose est certaine, c’est qu’on soit beau ou laid, maigre ou gros, petit ou grand, le pet sera toujours là, derrière, chantant et puant de santé. Et quand on pense que tout est fini, quand on est mort… on pète encore.

À bon péteur, salut !


Merci aussi à ceux qui n'ont pas lu.



 

Références


1


2


3


4


5


6

Wikipedia - La bataille des pets (1864). Waseda University, Japon


7


8 - Image


9

Seiren – Compagnie japonaise – Sous-vêtement

 

Informations supplémentaires


Myinstants – Farts collection



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